Près de chez moi
la rivière caresse les rochers
le courant ne cherche pas à les déplacer
la force de l’eau est de contourner les obstacles
bien sur elle érode lentement les berges mais ce n’est pas intentionnel
elle ne fait que passer
Nous ne faisons que passer nous aussi
le temps de ce passage
difficile d’admettre que notre cours puisse influer maladroitement sur notre environnement
voire blesser inconsciemment
Souvent l’eau laisse les agressions de coté
mais si on l’arrête sans raison
face au barrage
la rivière déborde
elle entre en crue
contrainte et forcée
cherche une issue
poussée par son élan naturel
suivre son cours en paix
Au plus fort du débordement
les dégâts peuvent être considérables
une caravane décapotée par un pont
une petite fille sur un toit au milieu d’une mer boueuse qui monte
qui monte
L’acharnement de l’adversaire à vouloir combattre n’est que la recherche d’une réponse justifiant sa colère
mais la hargne peut être contagieuse
peut-on apprendre à laisser les éléments s’agiter à leur guise
plutôt que systématiquement chercher la maîtrise
La rivière préfère consacrer son énergie à abreuver les champs
déposer de fertiles limons
regarder les graines germer
contempler les fleurs
partager les fruits
S’il vous plait lorsque j’rai embrasser mes ancêtres
réincarnez-moi en ruisseau
en attendant je vais travailler mon sens de l’esquive et l’art de l’éclaboussure
je finirais peut-être par apprécier mes clapotis
sans doute davantage que de claquer autrui
avec un peu d’entrainement j’arriverais à ne plus sortir de mon lit
juste illuminé de grands éclats de rives