Les cris du jour ou l'écrit du jour ? C'est peut-être le texte de la semaine (et pourquoi pas de l'année ?!!!!)
directement sorti de mon inspiration poétique, où chacun est libre de traverser la frontière entre fiction et réalité...
Bonnes lectures !

mercredi 26 avril 2023

Les origines du monde

D’abord il y a cette petite bulle apportée par le vent
l’enfant la suit du regard
son œil se reflète sur la surface irisée
l’enfant tente de l’attraper
la bulle éclate
un des éclats touche l’œil
et l’enfant pleure
blessé et vexé
il pleure tant
que la pluie est née
le niveau monte
et bientôt la mer porte l’enfant
elle le berce
il sourit
ils se lient
lui à elle
elle à lui
il se sent moins seul
elle est ravie
tous deux nagent dans le bonheur

Mais bientôt l’enfant a faim
alors d’une île jaillit la voie lactée
si abondante que l’enfant est rassasié
reput il s’endort
et de ses rêves s’échappent des nuages
tous prennent des formes variés
des hippocampes se mettent à hennir
des copains à applaudir
des fleurs éclosent en bouquets
et l’enfant sourit aux anges
dans son sommeil

À son réveil il se redresse
saute sur ses pieds
il est un homme à présent
et décide qu’aujourd’hui il va inventer la musique
en nageant, les flic-flac de ses bras et jambes donnent le tempo
quand il accoste, le vent dans les palmes ourle la rive
et des oiseaux trompettent à son arrivée
le jazz est né
l’homme se met à chanter
et d’autres chanteuses et chanteurs le rejoignent
ensemble ils se mettent à danser
et quand ils sont fatigués
ils s’accordent pour dire qu’il n’y a rien de mieux à faire
et la création du monde est terminée

 


Je t’écris un trésor

Je t’écris pour te dire juste cette petite évidence
il n’y a pas que les étoiles qui dansent

Dans un petit carnet où tu notais la pluie et le beau temps, une graine a germé
Je t’écris pour t’en remercier


Je t’écris de cette tempête où nous aurions préféré ne pas être
et pourtant nous en sortons plus grand peut-être

Je t’écris sur une carte d’embarquement
dans les turbulences d’un décollage qui a vécu longtemps
nous étions partis nombreux
nous sommes revenus séparément
sans regret et avec des étoiles plein les yeux

Parfois je repense aux nuages de Magellan
à la Croix du Sud
et aux volcans
je t’écris de cette terre lointaine
où j’ai rempli mes poches de feuilles de hêtres
de mangues et de gongs
Je t’écris du sol au plafond
du sable sous les tongs
comme si je me dépoussiérais après le big bang
Je t’écris du bord de l’arc-en-ciel
le trésor n’est pas caché
il est à nos pieds




lundi 24 avril 2023

Mes mains

 

D’abord le revers

Pas le coup droit

Parce que ma main n’est pas une raquette

Et de toutes façons je suis gaucher

Gauche un peu aussi

Mais recentrons-nous


D’abord le revers

Parce que j’ai envie de la poser à plat

Devant moi

Reposée

Détendue


Ma main droite est posée devant moi

Avec ses doigts sa peau ses veines ses tendons ses articulations

Détendue jusqu’au bout des ongles

Quelque chose palpite dedans quand même

De la vie qui boue


J’ai envie de voir ce qu’il y a en-dessous

Une paume

Ouverte

De texture et de couleur différentes du revers

Plissée de lignes qui se croisent


À l’intérieur de ma main

Il y a un vallon

Des cours d’eau au pied des collines

Quand je fais un creux et que je la porte à mon oreille

j’entends l’eau couler


Si je penche

Le torrent accélère

Et à bien y regarder

Si je penche encore

l’eau tombe en cascade du bord de ma main


Je récupère l’eau dans le creux de mon autre main

Ça tombe en cascade

Et je ne peux plus écrire

Alors je rééquilibre ma paume

L’eau récoltée retourne à la rivière

Et je la laisse couler


Elle coule sans bruit maintenant

Comme l’encre sur ma page

À part le frottement de la bille de mon stylo qui donne de petits coups sur la feuille

Des petits coups quelques traits et des courbes

Tracés par mon autre main


J’aimerais regarder dans cette autre main si le paysage est le même

Mais je ne peux pas car j’écris avec

Ma main ne veut pas lâcher le stylo


Pendant ce temps mon autre main s’est remise à plat

Le paysage a disparu

Mon stylo n’a plus de raison de s’agiter

Ma main le pose

Toutes deux se reposent