J’ai plongé dans la glycine
ça peut sembler facile
si ça l’était
nous serions plus nombreux
à brasser dans les parfums mauves
avec les abeilles
Il faisait nuit depuis longtemps
l’eau restait fraiche
malgré l’air épais
les pollens saturaient les filtres
à en brouiller la vue
Les coassements me parvenaient encore
les ondulations des anguilles lézardaient les murs
les grands arbres s’ouvraient à la lumière
je restais dans l’ombre
Le cœur de la pierre s’asséchait
ses battements sourds répondaient mal aux secousses du défibrillateur
le courant avait été coupé
seuls quelques spasmes réflexes
arythmaient ça et là
en direction de vains espoirs
Il faisait nuit depuis longtemps
mais une seule onde suffit
une courbe légère
un inattendu sourire vibrant
et la pierre se fendit
Le cours des choses revenait
fleurissant les rives d’aromes
annonçant des aurores paisibles
et des bains veloutés
l’aube se couvrait de lueurs pâles et soyeuses
puis revêtit ses atours de fête pour ouvrir le bal
ivre de danse elle me gardait dans ses bras
une île sans amarres
un frisson d’éternité
Enfin le jour se leva
comblé de lumière
enchanté de voix chaudes
les oiseaux les avaient précédées
j’avais oublié leur langue
j’avais oublié les paroles du lilas
la glycine me les rappela
Il faisait nuit depuis longtemps
je plongeai dans la glycine
le cœur vivant