Des heures que je n’ai vu personne
Ce grand vide me glace et me laisse sans teint
Je me sens transparent
Sans famille ni enfants
Quelle ingratitude
J’en perds la notion du temps
Mes pensées s’effacent
Pourtant je réfléchis beaucoup
Je m’y applique et m’y emploie à toute heure
Toujours prêt
Alors, quand personne ne vient se refléter
Je m’amuse à restituer la mémoire de mes images préférées
Cette tignasse hirsute au pied levé
Ce regard pressé
En retard comme d’habitude
Cette grimace appuyée
Entre un coup de peigne et de brosse à dents
Ce bouton d’acné parfaitement expulsé
Ce corps emballé dans une serviette
Aperçu à travers la buée
Ce doigt qui dessine un smiley
Ce coup d’éponge qui efface la trace de toutes ces réflexions passées
Souvent, mes jeux sont interrompus par un passage inopiné
Ou un simple changement de lumière
La balade d’un fantôme égaré
Au fil des années
Je dois m’adapter
Parfois, la nuit notamment, je m’éteins
Mes rêves prennent vie derrière ma face inerte
Endormi, je sors du cadre et prends une forme nouvelle
Inspirée de toutes celles que j’ai emmagasinées
Et je me contemple en moi-même
Avant de partir à la rencontre d’êtres de chair et de sang
Qui ne savent pas que je ne suis que le reflet d’eux-mêmes
De même que les cicatrices que je renvoie me rappellent mes propres fêlures
Enfin, une apparition soudaine me ramène toujours à la réalité
Mon éthique m’impose de revenir à ma place
Renvoyer l’image fidèle qui m’est présentée
Seul reste en moi le souvenir de ces instants de liberté
Texte rédigé sous l’impulsion du mot miroir, proposé par mon ami Kriss, avec la complicité de nos compagnons d’écriture Isabelle, Sylvie et Jerem.