Ma parole
la bouche en cœur
le mot à la bouche
la bouche en cul de poule
je l’ai sur le bout de la langue
la langue bien pendue
Toutes ces expressions accrochées à mes lèvres
font frétiller les papilles de mon stylo à bille
avec son petit sourire en coin
il salive sur la page
tentant de graver son ramage
un stylo qui donne de la voix peut paraître étonnant
pourtant j’en connais beaucoup qui se lèchent le babines
à l’idée de noircir quelques lignes
le mien se lisse les plumes avant de décoller
mais parfois il reste au ras des pâquerettes
Qu’importe le carnet à mon stylo
pourvu qu’il ait l’ivresse
il lui arrive même de mentir et d’user de sa langue de vipère pour médire
il s’écoute souvent
beau parleur
comme si sa parole était d’or
alors que je l’aime autant quand il dort
son petit capuchon posé sur la tête
couvant en silence sa bille d’argent
Il rêve alors
à la langue
ah ! La langue
à la longue
elle pend jusqu’à mes tongs
à force de jongler
avec les mots
avec les phrases
avec emphase
les bras m’en tombent
ma langue reste muette
comme une mouette
ma langue goûte et partage
parfois elle s’emballe
pas toujours sage
La tourner sept fois ?
Pour quoi faire ?
Ce n’est pas un moulin à paroles
gardez-vous bien de lui imposer un rôle
ma langue traîne parfois des pieds
voire recule
mais c’est pour mieux sauter
bondir d’un chant à l’autre
rouler des mécaniques
ou danser sur d’autres continents
bras dessus bras dessous
avec mes oreilles
à la rencontre de sonorités ensoleillées
ou caverneuses
elles vagabondent rêveuses
admirent des voix de cornemuses
bavardent et s’amusent
savourent en claquant du palais
comme des talons dans la poussière
la langue a des accents de vie éphémère
sa contemplation est un jeu
qui ne s’arrête qu’en la donnant au chat