Les cris du jour ou l'écrit du jour ? C'est peut-être le texte de la semaine (et pourquoi pas de l'année ?!!!!)
directement sorti de mon inspiration poétique, où chacun est libre de traverser la frontière entre fiction et réalité...
Bonnes lectures !

samedi 28 décembre 2019

Là où la lumière

Encore un sale coup de la sorcière nucléaire
qu’a promis plus que la lumière
nous sommes entrés dans son hiver
les poings sur tension
écrasés contre le béton de son sarcoeurphage de glace
la tempête a passé
et a paralysé nos paupières
position off
des engelures dans l’audace
de l’eau plein les godasses
le magicien d’ose ne passera plus
l’iode en surdose ne suffit plus
la terre a tremblé
la fissure a gémi
la sorcière nucléaire ricane à vilaines dents
son cœur profondément enterré
se fout du temps qui passe
les chiens peuvent aboyer
sa demi-vie passe passe et repasse
la sorcière nucléaire a plus d’un sale tour dans son sac
je me relèverais bien pour la foutre en vrac
mais c’est elle qui m’estomaque
la loi du plus fort reste la norme
pas la peine de chialer on nous avait prédit
un avenir irradié
alors je vous laisse à Dieu
de la neige carbonique plein l’écran
déjà je ne vous entend plus
emmurés dans le grand mazout
attendez si ça vous chante
de voir ce qu’il vous en coute
que la sorcière vous mette à bouillir dans son chaudroncercueil
je me taille
je quitte l’artère
j’emprunte les chemins creux
dans les sillons des poignets
avant que la déflagration ne les tranche
je n’attends plus la fée électrocutée
en tentant de sauver un ours polaire pendu à une guirlande clignotante
elle s’est étouffée avec sa baguette
trop grosse tartine
ciao frangine
ciao les frangins
emportant vos souvenirs dans mes narines
j’aimerais que vos stores se lèvent sur des matins aussi beaux que les miens
le regard plongé dans celui des arbres

je vais
là où la lumière
est

jeudi 28 novembre 2019

Rêves d'automne



Préférer le rêve ou la réalité

Au rêve je confie mes souhaits
au rêve j’explore mes vies inconnues
au rêve j’arrive sur des rives à la dérive sans rester rivé aux pentes en devers de réalités ivres

À la réalité j’envie des gens j’aimerais leur vie
au rêve j’oublie la jalousie
je vole avec la grâce d’une Andalouse
sans me soucier de choisir entre désir et envies

En réalité je prends mes rêves pour des extraits
des petits bouts d’autres vies que je vis en vrai
alors que m’importe de savoir que la physique la morale et la philosophie construisent des frontières pour séparer rêve et réalité
ma vie nourrit mes rêves
et mes rêves colorent ma vie


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Les rêves absents

Lorsque mes rêves s’absentent
ni où ni qui ni quand se mettent à clapoter d’une rive à l’autre
et me hantent en grève
il plane alors un parfum d’éternité


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Un rêve d’amour

Il y a cette porte qui s’éloigne
qui s’éloigne comme par peur
par peur ou par jeu
je ne sais pas si elle a peur
mais elle s’éloigne
elle s’éloigne et ses lois
ne correspondent plus
aux miennes
aux miennes plus classiques
où les portes ne s’éloignent pas
où les autoroutes avancent à toute allure
à toute allure sans se cacher dans les coins sombres
à toute lumière sous la lune
illuminant portes et routes dans un éclat de soleil
un éclat de soleil de vie
comme un éclat d’amour
d’amour et d’espace
un espace spacieux spatial et sans retour
un amour sans retour
qui va de l’avant
pas comme une porte
qui fait marche arrière
un amour sans retard
pour un voyage sans retour
un éclat d’amour
un amour tout court

Texte inspiré du « rêve en action » de l’excellent Ghérasim Luca.


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Je suis couvert de rêves

Je rêve
je rêve dans ma tête
je rêve dans mes pieds
je rêve de la tête aux pieds
je suis couvert des pieds à la tête
d’un manteau de rêve en peau de verre
cousu de songes désireux à souhaits
à vos souhaits et aux miens
des envies en veux-tu en voilà
en voilà des envies
des envies de vie
surtout dans la mort de la nuit
dans les nuits sans rêves
des nuits d’ennui
des nuits sans repos
des nuits réveillé
suivies de jours ensommeillés
des course-poursuites
de jour et de nuit
des jours mal réveillés
des jours esseulés
des jours isolés
des rêves de vous
des rêves de nous
de toi
de toit
de toits pour tous
et tous pour un
au fil du fleuret
pour en découdre
à la fleur du fil
pour coudre des rêves
cousus de fil blanc
pour ne pas perdre le fil
le fil d’une histoire
une histoire de perdue
dix de retrouvées
une histoire sans queue ni tête
qui rampe sur les coudes et les genoux
puis les articulations qui articulent
pour se redresser
et mettre les mots bien droit
pour ouvrir les bras
embrasser de doux rêves
sous une couette de duvet douillet
ronron papattes en croix sous l’oreiller
et ron et ron petits rêves dans mes petons
et ron et ron petits rêves entêtés

Texte inspiré du « rêve en action » de l’excellent Ghérasim Luca.

mercredi 27 novembre 2019

Pays de

Pays de sombritude
pays de sombre habitude
où la compétition domine
pour mieux engluer les plus faibles
au détriment des moins fiables
tu ne t’es pas fait tout seul
il y en a bien
qui les premiers
ont jeté les ponts
certains ont jeté l’éponge
et ping et pong
tu nous balades dans tes bas fonds
à nous smasher la tête
à nous enfermer dans tes filets
mais pauvre con de pays qui prend son cul pour une trompette
ton filet est plein de trous
et des petits malins passent et repassent
jeu
set
et match
pour se jouer de toi

Pays de maladie
pays de furoncles et de cancrelats
tu te crois plus fort
mais tu n’es rien
tu vis juste dans l’illusion
d’avoir trois coups d’avance
alors que tu as dix trains de retard
trop occupé à regarder de haut
tu ne vois pas la débandade en bas
de ceux que tu croyais asservir
ta barcasse prend l’eau
pays de marins d’eau douce
tu vas couler
et tes idées avec

Pays de patriarches
pays de machos
pays de porte-flingues
pays de salauds
ta fin est proche
profite encore un peu de tes certitudes
bientôt tu ne seras plus que doutes

Pays de sueur
pays de répétitions suintantes
pays de déjà vu
ankylosé
des fourmis dans les yeux
paralysé dans tes positions ridicules
comment veux-tu
comment veux-tu

Pays rongé dans l’enlisement
tu t’étouffes
dans ta course-poursuite
après le temps
sonnant et trébuchant

Pays de misère crasse
où une banane vaut autant qu’une maison
où une bourse vaut plus que la vie
tu t’assourdis dans les hurlements que tu provoques

Pays sans fond
sans vergogne
tout bringuebalant
qui va bientôt s’effondrer
comme un château de carte
ta puanteur me réveille la nuit

Pays de désolation
tu abandonnes tes enfants
tu les livres à l’individualisme le plus désespérant
au bord d’un puits sans fin
où bientôt ils te pousseront
personne ne regrettera ta sombre noirceur
lorsque la lumière sera revenue


 

Texte inspiré de « ma terre est un fond d’océan » de l’excellent Serge Lamothe.

vendredi 18 octobre 2019

Tourisme spatial


En 2001, le premier touriste de l’espace a voyagé 10 jours pour la modique somme de 20 millions d’euros. Avec mon fils, j’ai calculé qu’en gagnant modestement 20000€ par an, un salarié devrait travailler 100 ans pour s’offrir 1 jour de voyage ! Je vous laisse calculer le coût de l’escapade de 10 jours (sans compter les dépenses du quotidien pendant cette période… mais ne soyons pas mesquin ;-)

lundi 30 septembre 2019

Plonger dans la grande vague

Lorsque l’horizon n’est pas loin
lorsque cette ligne semble si proche
l’observateur pourrait être assuré de l’atteindre
il suffirait d’un pas
il suffirait de franchir la limite
il suffirait d’embarquer sans peur
mais les doigts crochus de l’inquiétude
se dressent avides telles des mâchoires
prêtes à tout avaler sur leur passage
ce pourrait être une gifle qui s’abat
ce pourrait être simplement
un coup de marteau sur une enclume
mais ce sont les éléments déchainés
auxquels osent se frotter les inconscients
seuls les esprits aventureux peuvent rivaliser avec la nature
hélas certains n’en reviennent pas




mardi 24 septembre 2019

Le vide sait

Le vide c’est
cette étrange absence
un pont entre le clair et l’obscur
un retour en arrière
ce passé si plein
quelqu’un était là à l’instant
dos appuyé sur les barreaux de bois
vous l’avez vu n’est-ce pas

Le vide est une pause
une attente
qui passe de l’ombre à la lumière
cet avenir froissé
l’incertitude de ce qui va advenir
qui sait ce qui va se passer

Le vide est une brèche
une ouverture dans des oppositions
qui déchirent un instant nébuleux
où des courbes pourraient mener de l’avant à l’après

Le vide est un silence pesant
un doute sans fond
semblant appeler à rire
pour briser les frontières
à coups d’échos

Le vide est une bouteille à la mer
dont le message reste sans réponse
l’expéditeur attend
supportant une petite musique mièvre
une information en boucle
on s’occupera bientôt de vous
on s’occupera bientôt de vous

Mais l’attente s’éternise
l’impatient reste sur la plage
bras ballants
espérant de toutes ses forces
colle ses oreilles aux vagues
à s’en briser les tympans
les flots lui chuchotent des phrases incompréhensibles
qui ne lui sont pas destinées

L’écume des nuits est plus douce que celle des jours

Les fonds sont bien plus lumineux qu’on ne le pense

Il y a toujours de la vie même dans les plus petits creux

Au loin le vent siffle
l’impatient longe la plage
continue de hurler contre les déferlantes
tombe nez à nez avec sa bouteille sans message
qui lui répond un chant vide
creux comme un jour sans plein

mardi 17 septembre 2019

Solidarité et automobile

N’est-ce pas incroyable toute cette mécanique bourrée de technologie qui nous transporte sans rechigner pendant des années et qui part en fumée dans un rugissement de moteur désespéré ? Je dis ça parce qu’hier soir, ma voiture m’a offert un grand spectacle digne des meilleures prestations pyrotechniques, au point de laisser penser aux habitants du quartier qu’un grand incendie venait de se déclarer ! Mais plus impressionnant que dramatique, cet épisode, où il n’y avait que de la fumée sans feu, a ouvert une sorte de faille spatio-temporelle dans mon emploi du temps et laissé la place à des rencontres imprévues.

Lorsqu’on tourne la clé dans le contact on n’a pas conscience que c’est peut-être la dernière fois. Combien de fois démarre-t-on ce fabuleux résultat d’une grande ingéniosité, cet aboutissement de longues études, de tests de prototypes, ce produit issu d’une industrie pharaonique ? Les nombreux ouvriers, techniciennes et autres ingénieurs qui dépendent du secteur réalisent-ils à quel point notre quotidien est entre leurs mains ? Du jour au lendemain, on se retrouve à pied, et s’enclenche un processus plein de rebondissements : annulation de rendez-vous, suivi de l’affaire avec l’assurance, échanges avec le dépanneur qui prend en charge le véhicule, etc.

Heureusement, un ami arrive ! Sans lui, point de salut. Cet ange-gardien vous épaule, et surtout vous véhicule le temps de régler cette affaire qui devient prioritaire et remise les autres activités en cours au rang de lointains souvenirs. Un bonheur n’arrivant jamais seul, une amie répond présente, immédiatement elle aussi, et vous prête sa voiture quelques jours, en attendant de trouver une solution à cet épineux problème. Que demander de plus ? Une nouvelle voiture ?

Le garage qui prend en charge la voiture moribonde et l’assurance préconisent le même cap : la casse. Il est vrai que le coup de théâtre du bolide laisse penser que la situation est désespérée ! Donc, la suite logique s’impose : vider le véhicule de tous ces petits trésors accumulés au fil des kilomètres, laisser la poussière sur les tapis et le réservoir quasi plein, puis déposer les clés et la carte grise à l’accueil avec un léger sentiment d’injustice et de gâchis. Le garage est sympa, il propose des occasions mais « Vu votre situation, nous ne pouvons pas envisager de prime à la casse et encore moins de prime à la conversion ». Je vous épargne le prix des occasions proposées, sans aucune cohérence avec la situation, le vendeur ne mesure évidemment pas que vous venez de perdre une voiture, de l’argent et que vous allez devoir faire face à une grosse dépense imprévue. On est toujours un peu mesquin dans ces cas-là, non ? Mais ne perdons pas de temps, allons au plus simple, cherchons un véhicule de remplacement.

Je vous la fait courte : mon garagiste habituel est un type malin et généreux. Alors que je lui rends visite pour voir s’il n’aurait pas une petite occasion pas chère, il me demande pourquoi j’envoie ma voiture à la casse alors qu’il sait où me trouver un moteur de rechange ! Vive le recyclage ! Je retrouverai donc mon fidèle destrier pour une seconde vie la semaine prochaine et, en attendant, l’enchainement heureux se poursuit avec un autre ami qui transmet l’info à une autre amie qui va me prêter sa voiture jusqu’à ce que je retrouve la mienne. Elle est pas belle la vie ?

Au début, la situation pouvait paraître tragique, on aurait pu se laisser emporter par l’émotion, mais quand on a une bonne étoile, on ne se refait pas, on attend la fin de l’averse en philosophant joyeusement : allons, ça pourrait être pire ! Et au moment où cette pensée vous traverse, vous croisez une amie en voiture qui vous interpelle en disant : « Hé, salut ! Comment tu vas ? Ça faisait longtemps ! Oups, excuse-moi, je remets ma perruque… », conclut-elle, en dissimulant coquettement une jolie boule à Z. Et de raconter comment se passe le traitement, la réorganisation du quotidien et les réactions de l’entourage. Je suis content de la revoir en forme et comme je lui raconte mes déboires automobiles, en précisant que je préfère ça qu’une patte cassée, elle me propose de me servir de taxi puisqu’elle est dispo en ce moment, et ajoute dans un éclat de rire : « Ça vaut mieux qu’une bonne chimio ! »

Que tous ceux qui ont gentiment proposé d’autres solutions que celles exposées ici, ou simplement été présent, ainsi que ceux qui se reconnaissent dans cette histoire, soient copieusement remerciés. Votre humanité est un trésor inestimable. Que la vie vous gâte chers amis !

mardi 10 septembre 2019

Nofrustration

Vous vous souvenez de vos premières tétées vous ? L’autre jour à la radio, le célèbre psychosophe nutritionniste Michel Gradounov, expliquait que nos frustrations commencent au moment où nous tétons le sein de notre mère. Voici une synthèse des propos de ce spécialiste.

Pour ceux qui ne se souviennent pas, imaginez cette crampe au ventre qui vous tenaille. Vous ne savez pas encore ce qu’est un ventre, ni une tenaille, mais vous ressentez un vide immense qui vous creuse la vie. Vous braillez autant que vous pouvez, puisque vous ne savez pas encore demander poliment qu’on vous serve à manger – d’ailleurs, vous ne savez pas ce qu’est manger, ni demander poliment. Puis, après un temps qui vous semble interminable, bien que n’ayant pour le moment qu’une notion assez relative du temps, une odeur familière vous alerte, soudain un sein s’approche de votre bouche et vous le gobez goulument. S’ensuit une vague de bien-être indescriptible. La douceur pleine et entière qui vous submerge s’écoule dans votre bouche, caresse votre gorge et vient remplir votre petit estomac et le rassasier alors que vous ne l’espériez plus.

Pour ceux qui ne se souviennent pas, allez demander à votre maman si elle vous a allaité et combien de temps. Certes, c’est délicat pour certains, comme demander son âge à une femme ou discuter sexualité avec votre grand-père, mais essayez quand même de vous renseigner. C’est important. Nos frustrations prennent parfois source dans cette offrande qui nous est faite au cours de notre plus tendre enfance. Ainsi, selon la durée d’attente, la fréquence des tétées et la qualité du lait maternelle, le nourrisson pourrait développer des pathologies plus ou moins graves. Il semblerait par exemple que les dirigeants qui ont été mal allaités soient plus enclins à la mauvaise foi, à la lutte armée et à tenir des propos stupides sans vergogne. Que ces malotrus n’aillent pas pour autant rejeter la faute sur leur mère, ils finiront bien par payer pour leurs crimes !

Quoi qu’il en soit, pour ceux qui ne se souviennent pas, imaginez cette plénitude que vous ressentiez lorsque vous étiez allaité, ou qu’un biberon venait vous sortir de ce puits sans fond dans lequel vous chutiez. Essayez de vous souvenir de toutes ces fois où vous avez été satisfait, de toutes ces réussites qui vous ont comblé, de ces moments où vous avez reçu ce que vous attendiez, ces petites et grandes joies qui ont jalonné votre vie. Faites-en un manteau et portez-le fièrement ! Sortez avec, surtout si un vent glacial de désolation souffle dehors. Coiffez votre plus rayonnante casquette et allez sans peur affronter les éléments ! Il y a fort à parier que vous rencontrerez d’autres énergumènes portant le même vêtement et avec qui vous pourrez vivre des histoires passionnantes.

J’ai bien aimé les mots du psy à la radio qui disait pour conclure : « La tétée est à la frustration ce que l’aventure est au doute. Celui qui bouge, explore et se transforme au contact des autres, sait toujours à quel sein se vouer » ! Vous vous souvenez de vos premières aventures vous ?

lundi 29 juillet 2019

Carpe Solo Diem

À quoi bon emporter la solitude partout avec soi
si ce n’est pour en prendre soin
pas de quoi en faire un foin
rester sur la paille et s’y accoucher
pour danser dans les blés
dans une farandole d’été
qui dès le début glisse
têtu dans sa pente salasse
et si c’était le dernier
autant le vivre à pleines dents
sourire rayonnant
de quoi éblouir le soleil
c’est ça rayonnons
mélangeons ce miel
dorons-nous la pilule
avant de l’avaler
dans de grands vers beaux
car qui d’autre mieux que la poésie nous sauvera ?
chacun a bien sa petite chanson en tête n’est-ce pas ?
les jours sans inspiration
on se laisse happer par cette luxuriance
cette insouciance
ces vagues prodigieuses
à vous en regonfler les batteries à bloc
pour faire un pas de mieux
un pas de deux
un peu plus loin
heureux

mercredi 24 juillet 2019

L’esprit libre

C’était un moment comme tant d’autres
suspendu dans l’air du temps
je laissais vagabonder mon esprit
dans une prairie

Parfois il s’arrêtait pour jouer avec une idée oubliée là
s’amusant à rassembler quelques concepts en petits tas
qu’il balayait d’un geste
comme au chamboule-tout

Puis il se remettait à caracoler dans les vallons
s’abritant un instant sous un arbre
à l’ombre d’une pensée
pour reprendre ensuite ses cavalcades

Il galopait le galopin
d’une inspiration buissonnante
à une argumentaire bien taillé
quand soudain je le vis s’arrêter

Mon esprit à l’arrêt
je voyais bien qu’il avait flairé une piste
je le suivais à distance
pour voir où ces effluves le mèneraient par le bout du nez

Je le sentais hésitant
comme s’il avait fallu qu’il passe par quatre chemins
avant de réussir à atteindre son but

Mon esprit s’embrumait
il semblait avancer à vue
tout en restant flou

Pourtant je sentais qu’il poursuivait cette piste
il semblait se rapprocher de la source
de ce qui l’avait mis en quête

Il avait visiblement repéré des indices
examinait des empreintes
rassemblait quelques éléments
pour pouvoir reconstruire le chemin le cas échéant

Et je voyais mon esprit fureter partout
fouiller dans ses poches
visiblement affairé à chercher quelque chose
tout en observant les alentours

Là où il s’arrêtait
je tendais l’oreille
j’essayais de comprendre
mais seul lui savait où il allait

Je le soupçonnais même un temps de chercher à me perdre dans ses pensées
dans ses circonvolutions sans fin
j’avais la nette impression qu’il voulait me faire faux bond
semer le trouble entre nous

Mais il n’en était rien
je me faisais des idées
il gardait ses distances certes
et ne dévoilait pas tous ses secrets

Cependant il avançait d’un pas que je pouvais suivre
parfois il me lâchait une petite bribe
il savait piquer ma curiosité
attiser mon appétit avec ses trouvailles

Il ne manquait pas de me partager un bon mot une astuce une pirouette
mais je n’étais pas dupe
je savais qu’il ne dévoilerait pas l’intégralité de ses mystères
avant d’avoir lui-même parcouru les méandres de sa pensée

J’aurais bien aimé attraper sa liberté
pas le mettre en cage mais l’apprivoiser
m’en faire un ami
mais c’était trop demander

Mon esprit n’en fait qu’à sa tête
il va où il veut
et il n’est pas question de lui imposer quoi que ce soit
ho bien sûr il se laisse porter par ses balises

Quelques phares l’éclairent dans la nuit
il enfile parfois des cadres dans lesquels il s’affiche
mais souvent il s’en fiche et je dois me faire une raison
mon esprit fonctionne avec sa propre autonomie et ses seules intentions

lundi 22 juillet 2019

Faut pas prendre les messies du bon dieu pour des lanternes sauvages

S’il faut voir pour croire
faut-il être aveugle pour mieux toucher ?
Beethoven et ses collègues durs de la feuille ont-ils profité de leur handicap pour épanouir leur génie ?
Le parfum ne m’a pas été livré lorsqu’on m’a fait le plein des sens
était-ce une raison pour me doubler l’ouïe ?
Et devrais-je pour autant être d’accord sur tout ?
Quant à ceux qui manquent de goût
trouvent-ils parfois de bons mots sur le bout de leur langue ?
De quoi partir dans toutes les directions et ne plus savoir sur quel pied danser

On perd ses vers
ça ne rime plus à rien
au risque de faire des contresens
et de se retrouver dans une impasse
errant dans tous les sens
sentant le doute s’insinuer dans l’errance
sur une route marquée d’empreintes
balisée d’échos
phar-dée d’effluves
suivant un cap aux saveurs graves
azimuté aux angles aigus
d’arêtes effilées
soyeusement
à prendre avec des pincettes
à frôler avec des gants
à mordiller du bout des dents
Quoi de plus charmant ?

Tous ces sens en éveil
stimulent des simulacres
où tout n’est qu’illusion

Allez demander aux entrées théâtrales combien elles touchent
à la mélodie du bonheur ce qu’elle exhale
au temps ce qu’il goûte
à la vie d’où elle sourd
à la mort sur quoi elle louche

Peut-être est-ce leur ombre
que les sens contemplent ?
À moins qu’ils ne soient éblouis par leur propre lumière ?
Est-ce qu’ils réfléchissent ?
Manquerait plus qu’ils rêvent !
Certains s’exilent laissant leurs corps courir comme des canards sans tête
D’autres se concentrent mais sans se concerter font perdre la raison aux hypersensibles qui les hébergent
les laissant vagabonder sur les berges
émotions en berne
drapeaux de soi bouchant les écoutilles

Une issue peut-être ?
Se laisser apprivoiser par ces précieuses sensations
s’en saisir en signature singulière
ériger la vie au rang d’égérie
portée par tous ces sens
sans queue ni tête
ni joute ni quête
rien de sensationnel
pas de grosse cavalerie
de troupeaux de tercets ou de quatrains au galop
ni d’alexandrins entrés sans sonnets
juste une légère élégie
en hommage à ces sens amis
sans qui nous ne serions que des corps sans vie

vendredi 19 juillet 2019

Pas de jaloux

Bien sûr je vous aime aussi
mes potos mes frangins
sans vous je ne serais rien

Mon père dont j’étais si fier enfant
et qui m’impressionne toujours autant
tu m’as offert la nature
le cadeau de sa contemplation
l’envie de l’étudier et de la transmettre
peut-on rêver trésor aussi grand ?

Nous héritons de nos aïeux
nos grands-pères qui aimaient tant la terre
la parcourir et la travailler
leur sang d’explorateurs coule dans nos veines
et leurs sagesses sillonnent nos mémoires

Et vous mes frères mes amis mes copains
combien d’aventures avons nous vécues
combien de jeux avons nous inventés
combien de monde avons nous bâtis
vous m’avez offert votre protection votre affection vos jeux de mots bidons

votre poésie naturelle et si belle
grâce à vous j’ai tenu sur des planches mêmes savonneuses
j’ai gravi des côtes ardues
dévalé des pentes vertigineuses
et remonté de creux insensés
vous m’avez plus d’une fois sorti de l’ornière
vous avez fait de moi un compagnon sincère
sans vous je ne connaitrais pas les sommets
je ne serais pas un homme complet

Le serais-je sans toi mon fils
toi qui m’offres sans condition ta vie
ton rire dès le matin
tes rêves et tes jeux pleins de passions
ton enthousiasme et ta détermination
ton regard neuf sans jugement
ta présence si douce
ton caractère si aimant

Vraiment les gars merci
sans vous la vie serait un enfer

Avec vous et celles qui aiment sans compter
c’est un paradis

jeudi 18 juillet 2019

Rien sans elles

Vous m’avez tant apporté
sans vous je n’aurais jamais déployé mes ailes

D’abord celle qui m’a couvé
merveilleuse mère
dans les bras de laquelle j’ai éclos
tu m’as offert l’amour et la sensibilité
la simplicité des tartines de beurre
l’efficacité de recettes joyeuses
la liberté d’un arc en ciel
et le goût des belles choses

Celles qui t’ont précédée
m’ont transmis l’intuition animale
le respect de la vie
et les mystères de la lignée

Il y a aussi mes sœurs qui m’ont appris des gros mots
à roter et tant d’autres jeux rigolos
nous avons grandi ensemble
nous nous sommes suivis épaulés
vous m’impressionnez
grâce à vous j’ai gouté à l’amitié aux fous rires au pouvoir de l’émotion

à la puissance de la méditation à la générosité à l’audace
et à la magie des histoires

Je n’oublie pas non plus celles qui m’ont un jour juste souri servi soigné formé encouragé sans attendre de contrepartie

Il y a celles aussi que j’ai aimées du mieux que je pouvais
et qui m’ont aimé en retour
malgré mes maladresses mes faiblesses et mes imperfections
vous m’apprenez la patience des rivages
l’écoute des nuages
la douceur des forêts de confiance
et l’humilité des oiseaux
vous me passionnez vous m’emballez et je deviens balle de coton

Vous avez fait de moi un homme
vous pouvez être fières de vous


Que votre chemin soit toujours fleuri
vous êtes ma force mon souffle ma vie

Grâce à vous je peux aller jusqu’au bout
j’espère partager dignement tout ce que vous m’avez appris

et je vous souhaite de continuer longtemps à offrir tout cet amour
à ceux qui vous entourent

mardi 16 juillet 2019

Désabusé encore soif

Quai de la solitude
quelle voie emprunter
aucun sens
pas plus qu’un quad sous le soleil en zen attitude
la cistude me double
une cistole dans le tube
y a une quenouille dans le pontage
le stent en bandoullière
repassez vos artères
sérieusement
la chose n’est pas à prendre sous la jarretière
j’en ai ma claque de tous ces cuistres
même seul ils me font l’effet du cidre doux
tous ces nez de bœufs
 

je les enverrais bien
se faire téter les yeux par les grenouilles de Nouvelle Zélande*
à les faire danser
autant que cette eau qui cavale de cascades en ruisseaux

Aucun sens j’vous dis
ni direction
que d’eau
que d’eau
un sac d’os
en guise de carapace
la cistude se planque dans sa roulotte
vieille eau fripée
ne cherche pas où est la tête
attend qu’elle sorte la bête
et après
et après mes yeux se ferment
mes oreilles suppurent
mes mains suent posent et stoppent leur ballet
dans un nuage de poussière éternué

Aucun sens si ce n’est l’expulsion insufflée par ce nez
un nouveau né
accouché là
sur le quai de la solitude
au milieu de tous
accueilli bras ouverts
brazou brazou
gazi gazou
la famille est là pour toi mon chouchou
tu l’as choisie et t’as bien fait
quoique quand tu la quitteras tu t’en mordras les doigts
mais vaut mieux ça qu’autre chose hein
marqué au fer
sigillé dans la terre de ta peau
le clan te colle
tu entends son appel le soir au fond des bois
le cor du clan qui te souffle dans l’embouchure
à t’en déchirer le pavillon
à t’en vriller le marteau et l’enclume
à en devenir sourd

Mais qu’est ce que tu dis
de quoi tu parles
t’es pas un peu toqué
ok revenons en au quai
à l’attendre le petit train de la solitude
avec ses wagons remplis de rien
ni plus ni moins
ni personne
pas même un vieux routard
un clandestin céleste voyageur d’essieu
oh bien
sûr il y a toujours cette bonne vieille étoile qui veille
mais qu’importe la forme qu’elle prend
sûr que ça éclaire
mais elle ne fait jamais la conversation
c’est toujours moi qui monologue
même quand j’invite plusieurs personnages
alors quoi
qu’est-ce que tu fous sur ce quai
t’attends quoi
avec tes valises à la remise

Quand j’irai de nouveau sur le quai
je ne monterai dans aucun express
je prendrai le temps de lasser mes semelles de vent
et j’irai à pied
pour m’arrêter à chaque rencontre
la seule à qui je dirai adios sur ce quai
ce sera cette loco de solitude qui ira voir ailleurs sans moi
hasta la vista !
 

* expressions d’origines inconnues...
issues du florilège de mon précieux héritage paternel !

lundi 15 juillet 2019

L’autre et moi

Ce matin je me suis réveillé à coté de moi
vraiment
pas beau à voir
tout flou
en double
tout décalé
rien à envier à un Picasso
tout de travers
mais vide en plus
genre kaléidoscope décoloré
vieux biniou désaccordé
tout déséquilibré
je me suis demandé qui j'étais
et j'ai répondu
j'allais vous demander la même chose
ça nous faisait un point commun
pas mal pour faire connaissance
alors on s'en est trouvé d'autres
et vous n'allez pas me croire
mais on est tous les deux cancer
ascendant je sais pas quoi
et ça nous fait une belle jambe
autre point commun
on en a deux
et des qui marchent bien en plus
avec tout ça j'en avais oublié que je n'étais pas dans mon assiette
et même plutôt à côté de mes pompes
ceci dit comme je marche pieds nus ce n'était pas ça le plus embêtant
non ce qui me chagrinais le plus c'était d'être là
côte à côte sans savoir qui je suis
et avec cet air bancal en plus
avouez qu'il y avait de quoi se poser des questions
je me suis donc redemandé
mais comme j'ai répondu pareil
on a décidé d'un commun accord d'aller voir ailleurs si on y était
comme on avait du mal à garder le cap
on s'est épaulés
et on est vite devenus copains comme des cochons de foire
je me suis raconté ma vie à cet autre moi-même et inversement
et on a été surpris de se connaitre si bien
chemin faisant on faisait donc connaissance
au point de ne plus avoir besoin de savoir qui on était
alors on est revenu à l'essentiel
on s'est recentré et on a décidé de revenir chacun de son coté à reculons
et c'est ce retour à rebrousse poil qui nous a sauvés
puisqu'à l'arrivée on ne faisait plus qu'un qui savait qui il était
cet autre moi-même m'avait reconnecté à moi
et je crois bien que, en toute modestie, sans moi il n'y serait pas arrivé
depuis je tiens droit
mes couleurs sont bien rangées
et je ne mets plus mes oreilles à la place de mon nez

samedi 13 juillet 2019

À la lune à la deux

Quand on écrit
de deux choses l’une
ou bien on écrit n’importe quoi
ou bien on n’écrit pas
hein ? parfaitement !
sinon c’est qu’on s’prend pour le roi
ou je n’sais quoi
alors qu’on est com
plètement nul
ou qu’on a le nez dans la lune

De deux choses l’une
quand on écrit
on écrit des tas d’choses sur les uns et les unes
et de là-haut on peut crier
terre en vue
si t’es ravie
je le suis aussi
quand tu chantes quand tu chantes quand tu chantes ça va
et la vie nous sourit
comme Nana
bin oui Nana nous sourit
à en décrocher la lune
avant d’avoir aluni
sur une île grecque ou aux Fidji
quand on accoste
ou qu’on écrit
de deux choses l’une
on raconte sa vie
avec un pull Lacoste
ou en slip laxiste
et on s’fait remballer parce qu’on a rien compris
soi-disant que la mode a changé
et qu’il faudrait penser à se mettre à la page

L’heure est aux histoires
si possible qui vous tirent quelques larmes
écrites à l’encre de tes yeux
merci Francis
j’aimerais quand même te dire
tout ce que j’ai pu écrire
je l’ai écrit du mieux que je peux
et ça
c’est pas rien
quand même
le mieux que je peux
c’est quand même mieux que des miettes de pneu
qui laissent des traces
comme les écrits qui restent
contrairement aux paroles qui tuent
avant de s’envoler comme des voleuses
c’est en tout cas ce que prétend ma logeuse
qui n’a pas sa langue dans sa poche
et la tourne sept fois dans sa bouche
avant de me répéter
quand on écrit
de deux choses l’une
ou bien on gagne sa vie avec sa plume
ou bien on la perd en pétant les plombs
c’est une question de poids
peut-être a-t-elle raison
à moins qu’on écrive sur du raisin
du canson ou du parchemin

Quand on écrit
de deux choses l’une
ça chemine et ça sonne comme des chansons
ou ça chuinte sans sonner
et c’est le bide assuré
mais qu’importe
le ridicule ne tue pas

Quand on écrit
de deux choses l’une
c’est une lutte acharnée
ou de la chair utile

à vous donner la chair de poule
nourrie de vers au grand air de belles idées
qu’on a muries dans sa petite tête
au bon jus de tripes
avec foi et cœur
on écrit à cor et à cri
quand ton corps sur mon corps
lourd comme un cheval gris
ne sait pas ne sait plus
s’il a raison ou tort
et on finit par croire
que ce que l’on écrit c’est pas des histoires


Qu’on y ait cru depuis le début
ou qu’on ait fait des faux départs
de deux choses l’une
quand on écrit
on croit pas si ben dire
et même parfois on comprend mieux après avoir relu
à reluquer la lune

et se laisser bercer par le bruit de vagues de vers en cascades
on écrit en acrobaties
sur des rivages au hasard des envies
des envies d’écrire et de crier

Crier hé
à la lune
jusqu’à la lie
et j’ai écrit
écrit hi
ho y’avait trop de bruit

Hé oui Christophe quand on écrit
de deux choses l’une
c’est un cri qui vient de l’intérieur
n’est-ce pas Bernard
ou un silence plein de profondeur
alors à votre bon cœur
écrivons écrivez
pour ne pas que les cris restent dans l’oubli
à la lune à la deux
merci

vendredi 12 juillet 2019

La vie en rose

J’ai rêvé d’un lac vert
bordé de flamands roses

Leurs becs en vrac

leur donnaient une tronche pastèque

Pour les sortir de cette humeur morose
je leur ai chanté 
Tu me fais tourner le bec
de Piaf


Ils m’ont réclamé autre chose
alors je leur ai sifflé
Wish you were here des Pink Floyd

et ils ont repris une dose

jeudi 11 juillet 2019

mardi 9 juillet 2019

Encore rien vu

Je n’ai encore rien vu
je suis allé ici et là
à l’autre bout
et même de l’autre coté
je croyais que ce serait suffisant
pour ça voir
mais je n’ai encore rien appris
faudra-t-il qu’on me crève les yeux ?

Nous n’avons encore rien vu
de la bêtise ordinaire à la super connerie
l’humanité a tellement de ressources
sommes-nous naïfs au point de nous laisser mener par le bout du nez ?
je manque souvent de flair mais parfois j’ai le nez creux
combien d’effluves faudra-t-il traverser pour sentir le vent tourner ?

Nous rêvons tous de happy ends
chacun le sien
chacun pour soi
et tous pour moi
où sont passées nos devises rêvées ?
ont-elles rejoint les valeurs perdues ?
des résidus de fond de bourses krachées

Je croyais avoir tout vu
mais le pire arrive
tranquillement
sans doute
ni inquiétude
ça va bien se passer pour le pire
mieux que pour le meilleur
le mieux est un échec
soyons en sûrs
le moins bien va se faire plaisir
le médiocre fleurit déjà partout

Et si nous le voyions tous ?
si nous
si le
si la vue nous revenait ?
mais la mémoire nous a quittés aussi
autant que l’imagination l’espoir et la solidaritaide
rien a envier aux apartheids de tous bords
le service ne sera plus assuré par des visages pales
trop occupés à gérer leurs petites affaires
à me faire gerber

Toute cette crasse
plein les yeux
après avoir tant contemplé
c’est si laid
mais c’est évidemment pire d’avoir le ventre creux
au milieu de bedaines prêtes à craquer
que d’avoir de la merde dans les yeux 
si les ventripotents se sacrifiaient pour nourrir les affamés
le monde retrouverait-il son équilibre pour autant ?

Au temps où vont les choses
je suis en overdose
entouré de semblables tout aussi accros
la vie ne leur a pas fait de cadeau
et nous errons tous désemparés
certains secoués de spasmes de survie
d’autres sûrs de savoir où aller pour aller mieux
hélas la majorité nourrie de croyances et de peur
choisit la voie du plus fort
nous reproduisons ces schémas éculés de dominations séculaires
incapables de prendre nos partages en mains
juste bons à fouler au pied 

le peu d’humanité qu'il nous reste
 
L’œil vide
la gorge sèche
râlant autant qu’on racle les fonds de tiroirs
à consulter des oracles pour nous tirer les cartes
et bien sûr la mort viendra et le diable et nous serons pendus
mais si au moins on n’attendait pas la prochaine coupe pour danser ensemble
même pas cap d’applaudir tous en même temps
si ?
chiche !

ils n’ont encore rien vu
les soi-disant puissants

ces peigne-culs
qu’ils nous entendent à en retrouver la vue !

lundi 8 juillet 2019

Juste après

- Désolé mais votre cœur a cessé de battre...
- Pardon ?
- Oui je sais, c’est difficile à admettre mais vous avez dû le sentir venir, non ?
- Bin c’est à dire que ces derniers temps je le sentais moins souple, moins palpitant, plus dur, comme s’il se pétrifiait.
- C’est tout à fait ça, c’est devenu un cœur de pierre. Vous auriez dû vous en soucier...
- Ha mais c’est le cas ! J’étais inquiet, je manquais de chaleur, je vivais dans un vide au milieu d’un creux. J’avais beau être entouré, ma famille et mes amis ne me suffisaient plus. J’avais l’impression de les consommer.
- Avez-vous tenté de remédier à cet état ?
- Quelle importance ? Il est trop tard de toute façon.
- Oui et non.
- Comment ça ?
- Tout ce que vous avez essayé a ralenti la pétrification et tout ce que vous avez abandonné a accéléré le processus. Certes il est trop tard pour revenir en arrière, vous ne relancerez pas la machine, mais votre route ne s’arrête pas là, comme vous pouvez le constater, et vous allez devoir repasser quelques épreuves.
- Ho, non ! Fichez-moi la paix !
- Je voudrais bien, mais je dois moi-même passer par là, vous êtes une de mes épreuves et vous ne m’avez pas l’air facile.
- Vous en avez de bonnes vous ! Moi qui croyais que je serais tranquille. Je préfère en rester là. Salut !
- Non, attendez, ne faites pas ça ! Vous allez empirer votre cas. Laissez-moi vous expliquer : si vous ne jouez pas le jeu, vous vous condamnez. Vous allez errer sans fin et croyez-moi vous allez comprendre ce que signifie s’ennuyer et je ne vous parle pas de tout ce que vous allez endurer.
- Bon ça va abrège ! Quel est le programme ?
- Premièrement, vous devez lister toutes vos erreurs.
- Ho la la ! Ça va être long ; et je risque d’en oublier.
- Rien ne presse, nous avons tout notre temps ; et pour ce qui est des oublis, vous serrez étonné de constater qu’il n’y en aura aucun.
- Et ensuite ?
- Deuxièmement, vous devrez hiérarchiser votre liste.
- Pffff ! Quel ennui !
- Oui mais vous n’avez pas le choix, il faudra bien vous y résoudre pour organiser vos actes réparatoires.
- Mes quoi ?
- Vos actes réparatoires. Il s’agit de ce que vous allez mettre en œuvre pour réparer vos erreurs.
- Bin voyons !
- Écoutez ! Je n’y suis pour rien, alors essayez d’y mettre un peu du vôtre, sinon on ne va pas s’en sortir.
- Ok, continuez !
- Notez que vous pouvez aussi choisir de commencer par la première idée qui vous vient en tête mais l’expérience prouve que la méthode que je vous expose est plus efficace. Bref, lorsque vous aurez hiérarchisée votre liste, je vous indiquerai comment procéder. Allez, bon travail, je vous laisse, j’ai d’autres chats à fouetter.
- Non, ne partez pas ! Comment je fais pour noter tout ça ? Et comment je fais pour vous prévenir que j’ai fini ?
- Votre cœur est sec mais vous avez toute votre tête, utilisez-là ! À bientôt.
- Non, revenez ! S’il vous plait !

Ha bin me voilà bien ! Pis y a rien ici, même pas un petit café pour commencer. J’aurais préféré lister ce que j’ai réussi, c’aurait été plus rapide.

Quelle déprime ! Lister mes échecs, j’en ai pour un bout de temps. Mais bon, puisque je suis visiblement coincé, autant s’y mettre. Alors par où commencer ? Le plus gros ? Le pire ? Punaise fait suer ! Je sens que je vais tourner autour du pot un bon moment avant de démarrer, comme si j’avais toute ma vie devant moi ! Si seulement je pouvais en finir avec cette logique comptable. J’espérais qu’au moins ici... Et si je pouvais recommencer je ferais en sorte de mettre fin à l’égoïsme qui a causé la pétrification de mon cœur.
- Ha bin vous êtes un rapide vous !
- Déjà de retour ?
- Oui ; puisque vous avez énoncé une bonne idée d’entrée de jeu. Vous avez gagné le gros lot ! Vous allez être réincarné en millionnaire. Accrochez-vous ! Ça va secouer, vous démarrez au moment où votre mère vous met au monde.
- Mais non, j’ai pas envie d’y retourner tout de suite !
- Shuuut ! Allez en paix, vous ne vous souviendrez de rien. Bon voyage, et tachez de faire mieux !

samedi 6 juillet 2019

Contemplation

La première fois que j’ai vu une âme errante, elle sortait de terre comme une brume en flamme, une sorte de lame solide tranchant l’espace. Montant lentement dans son éclosion inexorable, elle semblait figée dans son mouvement. Un chuintement léger émanait de sa forme massive. Si je l’avais vue aujourd’hui, après toutes ces années d’observation, j’aurais pris mes jambes à mon cou, de peur qu’elle ne me les coupe. Mais j’étais fasciné et sans doute avait-elle senti que je n’étais animé d’aucune mauvaise intention ; tous ceux qui ont essayé de leur nuire ont été lacérés. Et je contemplais ce phénomène avec l’innocence et la curiosité de l’explorateur que j’étais. Aujourd’hui, je sais que cette première âme errante massive rencontrée était une sculptrice de Montmirail. C’est en effet ainsi que l’on nomme ces entités qui dessinent de si belles formes dans les champs. Elles aiment que l’on regarde leurs œuvres et c’est surement pour cette raison que je ne fus pas tranché.

À partir de ce jour, je me consacrais à étudier ces étranges objets. Les plus grandes sculptrices de Montmirail avaient dessiné les pétroglyphes de Nazca au Pérou. Certaines se déplaçaient en vastes groupes et laissaient leur trace dans le sable des grands déserts, tandis que d’autres, plus légères n’oubliaient qu’une signature sonore, une chanson de vent ou un chant d’orage. Après avoir constaté les effets visibles de ces phénomènes, je me mis en quête d’étudier leur fonctionnement, leurs modes de vie, leurs habitudes les plus intimes. Je voulais tout connaitre des mœurs secrètes de ce qu’il est bien nécessaire de qualifier de nouveau règne. Quoique nouveau n’est sans doute pas approprié, tant certaines de ces âmes errantes semblaient anciennes. Leur étude ne me permit pas de connaitre leurs âges mais je parvins à saisir de quoi elles se nourrissaient. La plupart tenait leur énergie de leur propre mouvement.

Cette découverte fut décisive pour organiser leur classification. Ainsi fut choisie la définition de trois groupes : les ligneuses qui se déplacent dans une seule direction, les tortueuses dont le mouvement peut prendre des formes variées et les dimensionnelles qui vont jusqu’à voyager dans d’autres mondes. Prenons par exemple la première observation qui me fit les rencontrer. Il s’agissait d’une ligneuse. Elle émergeait lentement du sol après avoir traversé toutes les couches de la terre. Il y a fort à parier qu’elle avait sculpté la même forme en entrant dans le sol aux antipodes. Puis elle avait pénétré la terre, la roche et traversé ainsi les couches successives sur des milliers de kilomètres et, vue son allure, cela avait dû prendre un temps considérable. Chaque couche lui avait offert un peu de son énergie : des minéraux par-ci, de l’eau par-là et bien sûr du magma en fusion dont elle tirait ses qualités tranchantes.

J’avais eu l’occasion d’observer de près cette capacité à tailler la matière, un jour où je m’étais approché assez d’une petite éclosion. Il s’agissait d’une ligneuse de roche, de celles qui taillent les cheminées de fées. Dans son déplacement, elle avait coupé net une feuille d’aloès qui poussait sur sa route. La plante avait émis un son cristallin et la partie coupée était tombée sans résistance sur le sol, laissant apparaitre sur sa tranche son intérieur auréolé d’une lueur dorée. J’aurais aimé toucher mais je reculais à bonne distance pour ne pas sacrifier mes doigts. La partie coupée de la plante se posa sur la tranche et, lorsque je revins le lendemain, elle avait visiblement pris racine. Rassurant.

Les tortueuses ne semblaient pas si délicates et pouvaient provoquer des dégâts considérables. S’inspirant des formes de vents les plus violents, elles pouvaient raser une forêt en un rien de temps. L’une de leurs cicatrices les plus connues étaient la région des Tsings à Madagascar. Le troupeau à l’origine de ces profonds sillons de pierres devaient compter de nombreuses tortueuses. De petites modèles sévissaient plus modestement sur les côtes escarpées de tous les continents, comme à Ouessant. Les tortueuses aimaient déchirer les rivages et leur donner des formes acérées. Les plus petites soufflaient discrètement mais ne se contentaient pas de griffer des rochers ou de tailler des écorces. Elles vrillaient des troncs entiers, lentement mais surement et les pins témoignaient de leurs séjours espiègles. Il arrivait aussi que des tortueuses balafrent quelques animaux, voire des hommes, ou leur infligent des lésions plus internes. Les tortueuses s’insinuaient alors sous la peau, dessinant des eczémas et autres œdèmes scarifiés. Plus insidieuses encore, certaines pénétraient le système nerveux et imprimaient des humeurs changeantes sur les neurones de ceux qu’elles parasitaient. Hélas peu étudiés, ces phénomènes ne connaissaient pas de remèdes et laissaient les personnes atteintes et leur entourage désemparés.

Je soupçonnais les attitudes et les différentes manifestations provoquées par les âmes errantes, d’être autant de messages que nous ne savions pas déchiffrer. Mon intuition me poussait à m’attarder davantage sur les dimensionnelles. Je pressentais que leur compréhension permettrait de percer les mystères de toutes les familles d’âmes errantes. À force de les côtoyer j’avais acquis l’intime conviction qu’elles jouaient un rôle important dans la naissance de nos émotions et de l’expression de nos sentiments. Il me semblait d’ailleurs que l’humanité connaissait le développement de nouvelles formes de sensations. Ou plutôt que certains individus conservaient des archétypes émotionnels archaïques proches de nos origines animales, tandis que d’autres découvraient chaque jour plus de sensibilité. Ces changements paraissaient ouvrir les individus en question à d’autres perceptions et les âmes errantes dimensionnelles ne me semblaient pas étrangères à ce phénomène.

Au cours d’une expérience, pour laquelle j’avais réussi à isoler un spécimen dans mon laboratoire, je fus happé par le porteur et me retrouvais dans son corps ! Je sentais que j’avais quitté mon enveloppe habituelle et je reconnus en face de moi celui que j’étais avant ce transfert. Me fiant à une voix intérieure, je prenais congé du chercheur que je fus et me dirigeais vers le mur du fond de la pièce, le seul sans fenêtre. Je traversais la paroi comme si ce fut naturel et me retrouvais dans une pièce assez semblable à celle que j’avais quittée, bien que le matériel ne soit pas tout à fait le même. Je poursuivis mes pas d’un élan semblable à celui qui m’avait permis de jouer les passe-muraille et je me retrouvais à l’extérieur où je découvrais un paysage assez proche du nôtre mais plus luxuriant. La nature semblait ici davantage à son aise et l’air était plus sain. Alors que je commençais à m’interroger sur le sens de ces observations, je reconnus le déplacement d’air d’une petite tortueuse. Des poussières scintillantes s’agrégèrent sur son passage. Son vol pris la forme d’une belle calligraphie dans le ciel et je pus lire distinctement :

« Bienvenue dans votre 2e monde ! Prenez-en soin cette fois ! »

vendredi 5 juillet 2019

Le boucher

Le jour se lèvera bientôt et le boucher ne dort pas. Il a beau bailler à s’en décrocher le hachoir, ses yeux ne se ferment plus. Derrière ses paupières, des fantômes dansent. L’insomnie claque des doigts pour marquer la cadence. Il n’a pourtant jamais tué personne. Il a plus l’habitude de nourrir les gens que de les faire mourir. C’est un gourmand, il aime la vie. Pas comme ces bourreaux qui ont les mains pleines de sang. Quoique. Il a bien émincé quelques cœurs. D’abord généreux ami ou amant, il lui est arrivé de larguer des amarres, ou d’être quitté par des frères et des sœurs qu’il croyait aimer pour toujours. Alors le boucher ne dort pas. Son petit cœur saigne d’avoir perdu ou trahi, et ses fantômes dansent dans la nuit. Il aimerait renouer avec ces âmes perdues, les resservir et les aimer, leur redire « Y en a un peu plus, j’vous l’mets quand même ? » Mais personne ne franchit plus le seuil de sa boutique depuis longtemps. La vie éloigne parfois ceux qui s’aiment et le boucher ne dort pas, car ce n’est pas avec de la ficelle à rôti qu’on peut retisser des liens et se pardonner. Alors les fantômes dansent dans la nuit et entrainent le boucher dans leur farandole. Ils le poussent, le balancent et l’enivrent de leurs cris, comme des animaux qu’on égorge. Ils lui font perdre la tète, et le boucher perd pied. Certains fantômes lui chatouillent les côtes à en pleurer. Il voudrait les embrasser, les calmer, les attendrir, mais ils le repoussent. Il trébuche et tombe. La folle danse s’achèvera dans un bain de sang, sans musique macabre ni rythme cadencé. Les fantômes s’insinuent silencieusement dans l’homme blessé, ricanent de le voir incapable de se relever. Leurs sarcasmes crépitent dans sa carcasse. Ils le saisissent et il a beau se débattre, ils le pendent par les pieds à ses crochets, le dépècent et le vident, déroulent ses entrailles, sans se soucier du boucher qui braille. Cette petite danse les a affamés. Ils mangent les abats, découpent les morceaux de choix, s’en payent une bonne tranche et récoltent l’âme damnée du boucher. Elle gît, pale, exsangue et pauvre, dans un petit plat, sans bien comprendre ce qui lui est arrivé. Alors son fantôme préféré ferme les yeux du boucher. Il va pouvoir enfin se reposer, maintenant que le jour est levé.